Pour L.

École de la Soie,
vendredi 7 juillet 2006,
00h06…Salut copine,

Oui tu as bien lu, il est minuit passé et je fais mon Bernard Quichon, je suis encore à l’école… Je multiplie les actes manqués en ce moment. Ce jeudi matin, je suis arrivé à 10h30 à Prainet pour finir le journalekat… mais aussi sans doute, pour ne pas accélérer le décompte de mes deux dernières journées d’école à Décines. Ce jeudi soir, veille de vacances, je dors à la Soie – enfin chez Brigitte, mais c’est bien les murs de la Soie… – j’crois qu’y’ aussi du symbole là-dedans.

École de la Soie, Décines

Seulement voilà, j’arrive pas à dormir. Voilà plus d’une heure que je tourne en rond, j’ai l’impression d’avoir chaud, soif, mais en fait j’ai un gros nœud dans l’estomac et il y a tempête sous mon crâne. Je suis complètement naze, fatigué physiquement, nerveusement, émotionnellement… mais j’arrive pas à dormir. J’ai eu Karine au téléphone il y a une demi-heure, mais j’ai refusé de craquer, de tout lâcher au téléphone, même si le simple fait de l’entendre a commencé à fissurer mes défenses… Et puis, j’ai fini par descendre d’un étage pour me glisser en douce dans la salle info. Il faut que j’écrive. Il faut que je t’écrive.

C’est une certitude, la soirée de mardi m’a incroyablement fragilisé sur le plan émotionnel. Il y a eu les larmes du moment, sous le coup de tous les messages d’affection et de tendresse qui m’ont été adressés, mais je prends en pleine face le contre-coup de tout cela, je n’arrive pas à refaire surface (alors que j’ai pourtant bien fini de cuver), et puis j’ai vraiment peur de demain, de cette putain de fin d’année, et de me retrouver tout seul avec mon blues ce vendredi soir… J’ai peur de pas avoir suffisamment exprimé à tous ceux qui étaient là combien j’ai été touché par tous les mots de cette incroyable soirée, peur de pas leur avoir dit assez clairement le bonheur que j’ai eu de les rencontrer, et de les côtoyer pendant trois ans. Une peur panique de partir sans leur dire que je les aime.

Et là, tout me ramène à toi. Je ne peux rien écrire à qui que ce soit sans commencer par toi. Mes premières larmes de mardi soir, je te les dois… Tout était très fort, trop fort, mais c’est tes mots qui me trottent dans la tête, en boucle, au-dessus de tous les autres !

Au milieu de toutes les déchirures que constitue cette fin d’année, parmi toutes les personnes que je m’apprête à quitter, tu ne peux imaginer la place que tu occupes. Tu es Prainet, tu es la Soie, tu es Jánga, tu es mes amis, ma famille… celle dont parle Goldman :

Tu es de ma famille, de mon ordre et de mon rang
Celle que j’ai choisie, celle que je ressens
Dans cette armée de simples gens
Tu es de ma famille, bien plus que celle du sang
Des poignées de secondes dans cet étrange monde
Qu’il te protège s’il entend…

Oui, je dis aux gens que nous sommes frère et sœur… tellement fier d’être ton ami, ton frère, tellement heureux de cette relation si forte, si simple et si vraie que nous avons développée au fil du temps !

J’ai pleuré au moins vingt-cinq fois en relisant les mots que tu m’as dédiés mardi soir… je les entends encore, je te revois les dire, ces mots qui t’appartiennent si bien, qui ressemblent tellement à celle que je connais, à cette amie que j’aime, ces mots qui définissent si bien ce que nous sommes… c’était drôle, vraiment très touchant, beau, grand, fort, énorme…

Si je t’ai chambré mardi soir en te disant que tu dévoilais publiquement notre histoire privée, c’était juste de l’humour éthylique, surtout pas un reproche… De N’Dangane à Marseille, de l’asso à l’école, tu es partout dans mon histoire depuis cinq ans, depuis ce jour de Sénégal… (D’ailleurs c’était pas en août, c’était le 30 juillet 2001 ! Et puisqu’on est dans le pinaillage, Karine est elle franco-danoise, pas franco-suédoise ;-))

A quoi ça tient une existence, une vie qui bascule… Les rencontres qui changent une vie, je pourrais en causer ! Tiens d’ailleurs tu étais encore là pour un autre tournant de ma vie… C’était le 7 juillet 2003, à Dakar-Colobane, sur le balcon chez Amath, la veille de ma rencontre avec Karine… Il y a trois ans exactement. JOUR POUR JOUR ! (Oui, je suis un garçon qui croit beaucoup aux signes…)

Ces trois dernières années auront été particulièrement fortes, j’ai rencontré grâce à toi (à l’école et dans l’asso) des gens exceptionnels sur tous les plans… Nous avons passé tellement de temps ensemble, nous avons partagé tant de projets, tant de délires, tant d’émotions… Que du bonheur, tout ce vécu avec toi, que j’emporte avec moi à jamais !

Tant de peine pourtant aussi de perdre ce lien, cette présence amie quotidienne, ton sourire et ta joie de vivre même dans la difficulté, le réconfort d’une belle âme confidente… Tu sais toucher les gens, je le sais depuis longtemps, les vrais amis de Prainet à la Soie n’ont cessé de me le confirmer à l’école, Geneviève encore il y deux jours… Mais d’autres aussi, Karine bien sûr, ainsi que ma cousine et ma mère auprès de qui je me suis un peu épanché à ton sujet depuis mardi !

Tu vas sacrément me manquer, mais tout de même, qu’est-ce qu’on a eu de la chance de vivre et de partager tout ça et tellement plus depuis cinq ans… Où que j’aille, je t’emmène avec moi.

A très vite.

Cyril

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